Nez rouge en panne sèche de bénévoles

En passe de fêter son 20e anniversaire, l'antenne Opération Nez Rouge Neuchâtel est aux abois! En ramenant, chaque fin d'année, à bon port et gratuitement, les conducteurs aux facultés affaiblies, l'organisme est victime du succès de son organisation sans failles et de son empathie. Car suite à l'essor spectaculaire connu l'hiver dernier, la demande prend l'ascenseur, et les bénévoles font inexorablement défaut ...
Témoignages.

 

Nez Rouge victime de son efficacité et de sa gratuité

Fin d'année Prête à fêter ses 20 ans, l'antenne neuchâteloise est aux abois. La demande prend l'ascenseur, et les bénévoles font inexorablement défaut.

«On ne veut pas peindre le diable sur la muraille, mais on a de plus en plus de demandes, et si on n'a pas plus de bénévoles, on ne pourra plus les assumer et on devra un jour dire stop, on arrête... » Président de l'antenne Opération Nez Rouge Neuchâtel, Jean-Marc Colin ne crie pas victoire en recensant déjà près de 250 bénévoles pour la saison 2012. Loin de là! Car suivant le calendrier établi, 541 places seront à repourvoir, et l'opération débutera le 7 décembre. Dans moins d'un mois... En reconduisant, chaque fin d'année, à bon port et gratuitement, les conducteurs aux facultés affaiblies, l'organisme est victime du succès de son organisation sans failles et de son empathie. Et après un premier grand pic vécu en 2006, l'hiver 2011 a connu un essor spectaculaire, avec près de 600 transports dans le canton. Soit 200 de plus qu'en 2010. Au moment de fêter son 20e anniversaire, l'antenne neuchâteloise est logée à la même enseigne que les autres sections romandes ou alémaniques: en quête de relève, «pour remplacer ceux qui commencent un peu à prendre de l'âge et veulent décider d'arrêter».

Sans plan B

Les bénévoles ne poussent pas comme des cèpes, et encore moins en période de fêtes, où le principe d'ONR propose certes un plan hors pair. Pourquoi choisir entre boire et conduire, puisqu'il suffit de composer le 0800 802 208, pour obtenir sans peine, et dans les meilleurs délais, un service efficient sans bourse délier?
Pour équilibrer l'offre et la demande, aucun plan B n'est néanmoins pour l'heure imaginable.
A entendre Jean-Marc Colin, les abus ne sont pas courants, et n'expliquent pas la hausse des sollicitations. «Ça ne représente pas une majorité. Il s'agit de quelques personnes, et ça ne prête pas trop à conséquence».
Or, si la philosophie Nez Rouge encourage la sécurité sans discrimination, elle a tout de même fixé ses limites. Au seuil d'un cinquième engagement, Angelina Sandona, de Saint-Aubin, en témoigne: «Une personne a une fois insisté pour qu'on fasse des détours pour aller chercher ses copines». Une situation équivoque, inacceptable pour ONR, mais réglée sans trop de bisbilles. «Cette personne a finalement décidé de ne pas venir avec nous. Mais on n'a pas su, par contre, si elle avait pris son véhicule ou pas?»
Véhiculé et respecté, le client n'est donc pas roi pour autant. La sécurité des bénévoles passe avant celle des trouble-fête. Jean-Marc Colin tient à le rappeler:

«Une personne a une fois insisté pour qu'on fasse des détours pour aller chercher ses copines»
Angelina Sandona, bénévole depuis 2007

«Les chauffeurs comme leurs accompagnants savent que si les gens se montrent trop violents ou malpolis, ils ont le droit d'arrêter la voiture au bord de ta route et de les laisser là. Il n'y a pas d'obligation de les accompagner jusqu'au bout»

Pas si contraignant

A l'heure où elle espère atteindre son quota de bénévoles, l'antenne Nez Rouge Neuchâtel compte du moins déjà sur une quinzaine de nouveaux venus.
Des jeunes, âgés la plupart entre 20 et 30 ans. Au sein de ce noyau d'émergents: le Loclois Matthias Hôtschfeld, 21 ans.
Prêt à se plier aux conditions requises (voire encadré), il explique ce qui, selon lui, dissuade beaucoup de jeunes à s'impliquer dans l'action. «C'est surtout le fait de ne pas pouvoir faire la fête le soir d'avant, en se permettant de rentrer à trois ou quatre heures du matin. Ça demande vraiment de la motivation et de la planification».
En vue de motiver les troupes, les plus anciens font scintiller les avantages d'un volontariat valorisant, et tout compte fait pas si contraignant, puisqu'entrepris sur une période déterminée, voire même rien que durant une seule soirée. Et outre ta belle ambiance régnant au sein de l'équipe, les trajets s'exposent sans autre aux rencontres sympas; voire même aux fous rires d'anthologie, nourris par des anecdotes bien souvent croustillantes ... /SDN

Infos & inscriptions: 032 753 49 41


Les règles d'or du bénévole

Pour intégrer l'effectif des bénévoles d'Opération Nez Rouge, une simple séance informative suffit. lors des missions, les équipes sont toujours composées de trois éléments. le Chauffeur Nez Rouge, qui conduit le véhicule de l'organisation, le Chauffeur Client, qui prend le volant de l'automobiliste réquérant, et finalement l'Accompagnant, dont le but est de soutenir l'équipe comme le client. Outre les précautions requises pour mener à bien l'opération, chacun est tenu de se soumettre aux conditions suivantes:

  • Ne pas consommer d'alcool et de substances illicites durant les 24 heures qui précèdent le début d'une mission.
  • Respecter le code de la route et les limitations de vitesse.
  • Faire preuve de confidentialité et discrétion vis-à-vis du client.
  • Ne pas empocher les pourboires, qui sont reversés, chaque année, en faveur d'un organisme caritatif.
  • Ne pas porter de jugement sur l'état ou l'aspect de l'appelant.
  • Arborer une tenue vestimentaire propre. /SDN

Les habitués des taxi n'ont pas le «réflexe» Nez Rouge

Prétendument concurrencielle aux taxis, la formule Nez Rouge ne se profile de loin pas comme telle. Chauffeur de taxi à Neuchâtel depuis 10 ans, Samuel n'a jamais constaté une baisse de courses pendant l'activité d'ONR. Il l'encourage, au contraire: «Ce sont des périodes durant lesquelles on n'arrive de toute façon pas à satisfaire toutes les demandes». De son avis, par ailleurs, les habitués des taxis n'ont pas le «réflexe nez rouge». Ce qui va de soi d'après Jean-Marc Colin: «Les gens qui partent faire la fête avec leur voiture aiment bien, en général... rentrer avec». /SDN

Article du Courrier neuchâtelois du 14.11.2012
Par Salomé Di Nuccio